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Nouveau tour de vis contre les sans-papiers en France: Des milliers d’Algériens dans la tourmente

Des milliers d’Algériens en situation irrégulière risquent l’extradition

Aux centaines de milliers de sans-papiers, subitement pris entre marteau et enclume en France, le président Emmanuel Macron a eu cette réponse : «Vous avez des devoirs, avant d’avoir des droits», rajoutant une autre couche d’opacité à leur sort très incertain.

«Les choses ne sont pas données. J’ai été pris à partie a plusieurs reprises. La France prend sa part dans l’immigration qu’il y a aujourd’hui, nous continuerons de le faire. On va continuer à investir pour héberger et former mais il faut aussi que celles et ceux qui arrivent sur notre sol prennent leur part de devoirs pour faire l’effort sur la langue, pour faire l’effort pour les formations et ensuite pour avoir un travail, c’est la clé», a-t-il ajouté. «Nous sommes un pays généreux mais on doit respecter les règles, on ne peut pas donner des papiers a tout le monde», a souligné le chef de l’Etat.

Et quand un sans papier dit : «ça fait huit ans que j’attends», Macron répond :«ça veut dire que vous ne remplissez pas les critères. On prend notre part, mais on ne peut pas accueillir tout le monde», a répliqué Emmanuel Macron, dans une phrase paraissant faire un lointain écho a l’affirmation demeurée célèbre, en 1989 par Michel Rocard alors Premier ministre socialiste, que la France ne pouvait pas «héberger toute la misère du monde».

Les premiers signaux négatifs pour la très forte communauté algérienne en France commencent à se propager. À Elbeuf, une manifestation contre l’expulsion de deux lycéennes algériennes tourne en boucle sur les réseaux sociaux.  Leur comité de soutien proteste contre le refus « systématique » de la préfecture de Seine-Maritime de régulariser Ouardia et Célina, deux Algériennes, frappées par une obligation de quitter le territoire français. À l’appel de RESF (Réseau éducation sans frontières) et de plusieurs syndicats de l’Éducation nationale (SUD Éducation, FSU, CGT Éducation), des professeurs, des élus et des lycéens manifestent ce jeudi 20 mai 2021 en milieu de journée devant le lycée Ferdinand-Buisson, à Elbeuf.

« Ouardia et Célina ont reçu une OQTF (Obligation de quitter le territoire français) quelques mois avant de passer leur bac, explique Jean-François Jaudon, professeur de philosophie au lycée polyvalent. Nous avons l’impression que la préfecture envoie des OQTF de manière systématique en ce moment, quel que soit le dossier. C’est aux plus débrouillards d’intervenir pour faire en sorte que leur dossier soit réexaminé. »

Célina, 20 ans, vit en France avec ses frères et sœurs depuis mars 2016. Sa marraine, Corinne Gobin, 1ère adjointe au maire d’Amfreville-la-Mivoie et professeur au lycée Buisson se dit scandalisée : « C’est la première fois que je vois ça. Elle est intégrée et prise en charge pleinement. Elle a toutes les qualités pour réussir. Elle est studieuse, motivée, assidue… »

Ouardia, 19 ans, veut être médecin. « Le préfet leur demande de rentrer dans leur pays (en Algérie, ndlr), pour demander un visa long séjour et avoir ensuite accès à la carte de séjour étudiant, précise Jean-François Jaudon. Mais on sait pertinemment que si elles rentrent en Algérie, elles n’obtiendront jamais leur visa. »

Le signal avait été donné pour les Algériens au début de l’année. Sarah Guenifid a quitté l’Algérie avec ses deux enfants pour la France en septembre 2018 pour soigner son plus jeune fils, autiste. Mouad, 6 ans, est scolarisé en grande section de maternelle à l’école Jean-Philippe-Rameau, à Rouen. Sa mère se bat aujourd’hui devant la justice pour contester une obligation de quitter le territoire français reçue en juin 2020.

Des cas médiatisés mais symptomatiques d’une France qui ploie sous le poids de ses contradictions internes. Si le discours officiel encense le respect des droits-de l’homme, de l’immigration « positive » et du brassage des communautés, dans les faits, un tour de vis remplace un autre, un bornage cède le pas à un autre…  

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