Site icon L'Express Algérie

Le nécessaire « coup de balai » dans la « jungle » de la presse papier

Le nécessaire « coup de balai » dans la « jungle » de la presse papier

L’ancien sélectionneur national et footballeur international Rabah Madjer a comparu le 7 octobre 2021 devant le tribunal de Sidi M’hamed, à Alger. En effet, suite à une convocation directe, dont il a été destinataire, il s’est présenté devant le juge instructrice de le 15e Chambre de tribunal de Sidi M’hamed.

Dans une déclaration faite à sa sortie du tribunal, Madjer a affirmé que sa convocation devant cette juridiction concernait « le règlement de quelques détails juridiques concernant son activité commerciale ; une affaire liée à une société de médias que je gérais auparavant ».  À ce propos, il a tenu a souligner qu’il était « absent lorsque le journal « El Balagh » avait été fermé (…) à mon retour, j’ai transmis le dossier de l’agence nationale d’édition et de publicité (Anep) à la Justice ». De ce fait, « il n’y a aucun autre problème », a-t-il encore tenu à préciser.

Ce que les professionnels reprochent à Madjer, et c’est certainement là, une transgression éthique et professionnelle, c’est d’avoir pu accéder commodément, par connivence ou par complaisance, du temps du système Bouteflika, à construire un groupe de médias (deux journaux, en fait), avec toute la panoplie qui s’ensuit, c’est-à-dire l’essentiel : la publicité institutionnelle. Madjer a pu ainsi posséder deux titres : « El Balagh er-riadhi » et « El Balagh ». Le second titre, « El Balagh », a encaissé à lui tout seul, en quatre années, plus de 30 milliards de centimes. 

Si tout rentre dans l’ordre pour Madjer, c’est tant mieux pour lui. Toujours est-il que cette énième affaire d’un média papier devant un tribunal démontre une nouvelle fois, le haut degré de toxicité de la faune qui entoure depuis des années le métier d’informer. 

Pirates, corsaires, flibustiers et autres boucaniers ont investi la presse papier en force depuis 2010, créant une presse artificielle, « Anepovore », qui prend des milliards sans rien donner, ni sur le plan de la formation des journalistes, ni sur le plan du bien-être financier de ses salariés ni encore moins sur le plan strictement médiatique : ni éclairages pour les décideurs ni influence sur le lectorat. Rien. Comme si elle n’existait pas.

Cette presse a créé le salariat, le fonctionnariat, la paresse, le clientélisme, le copié-collé (vite transformé en copié-coulé), alors que le journalisme est un métier de guerrier, de compétition, de compétence et de performance. Là où on devait trouver brillance, adresse et sagacité on repérait méprises, sornettes et divagations.     

Et comme il n’y avait aucune aventure intellectuelle à mener, on s’en est vite trouvé à ne s’intéresser qu’à la rente publicitaire, sans aucune contrepartie. Des maraudeurs et des chapardeurs se sont trouvés à la tête de journaux sur lesquels ils n’ont jamais aligné une phrase correcte. Par des curieux tours de passe-passe des affairistes sont devenus propriétaires de 3 ou 4 titres, au mépris de la loi sur l’information qui limite à une seule publication d’information générale. Des titres qui ont vu le jour il y a 20 et 25 années, font toujours du surplace, se posant comme des TPE familiales, rentières et faisandées à l’outrance. 

Résultats des courses, la nouvelle génération de diplômés de journalistes des universités algériennes a été totalement massacré et brisé net dans son élan d’apprendre dans un milieu qui, malheureusement, n’avait plus rien à leur apprendre, hormis le gain rapide et le sens des « affaires ».  

La gangrène de l’argent facile, de la rente et l’embourgeoisement a crée de ce fait, une faune de gloutons insatiables qui ont allègrement mené la presse à sa faillite. Il est vrai que les dérives des médias découlaient de dérives politiques. Mais là où la dérive du politique est compréhensive pour ses écarts, car elle procède  de l’art de gérer les contraires, celle des médias, ne l’est pas, son rôle étant  avant tout intellectuel. D’où la nécessité de continuer en profondeur un travail déjà entamé, celui de séparer le blé de l’ivraie, c’est-à-dire de dissocier le journaliste du parajournaliste, le journal de la pizzeria, et au final, le médiatique du commercial. Travail de longue haleine dans un terrain miné.  

Quitter la version mobile