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Amel Brahim-Djelloul, sur les chemins qui montent

Amel Brahim-Djelloul, sur les chemins qui montent

A la croisée des cultures, Amel Brahim-Djelloul fascine tout autant qu’elle attire à elle des artistes de différents horizons. Passée par le « Jardin des Voix » de William Christie et nommée en 2007 dans la catégorie « Révélation Lyrique » des Victoires de la Musique classique, Amel Brahim-Djelloul a rapidement incarné de nombreux rôles à l’Opéra : Susanna, Pamina, Despina, Servillia, Nanetta, Drusilla … dans des théâtres prestigieux comme l’Opéra de Paris, l’Opéra de Lausanne, le Staatsoper de Berlin, le Théâtre de la Monnaie à Bruxelles, le Grand Théâtre de Genève… ou encore le Festival international d’Aix en Provence.

Régulièrement invitée par de nombreux orchestres et ensembles internationaux, Amel Brahim-Djelloul élargit chaque saison sa palette de projets personnels qui, souvent, relient Orient et Occident. Sa discographie comprend de nombreux opus, dont des récitals avec les pianistes Anne Le Bozec (Les 1001 nuits), Nicolas Jouve (Populaires), ainsi qu’un programme d’oeuvres du patrimoine arabo-andalous (Amel chante la Méditerranée), avec l’Ensemble Amedyez.

Un projet qui vient de loin

Ceux qui la connaissent savent déjà combien l’art lyrique qu’elle pratique dans les plus belles salles avec les plus beaux orchestres pour les plus belles pièces du répertoire ne la résume pas tout à fait. Non qu’Amel Brahim-Djelloul n’y consacre une remarquable carrière lyrique au cours de laquelle elle a déjà interprété les plus grands rôles, mais dans ce parcours aussi chevronné que brillant se lit également une relation particulière à d’autres cultures. Et particulièrement à celle de ses origines algériennes et à celle de la culture kabyle vers lesquelles elle revient aujourd’hui, comme si l’art lyrique l’avait guidée jusqu’à ses racines.

Bien sûr, il y eut ces programmes avec la pianiste Anne Le Bozec (Les 1001 nuits), ainsi que cet hommage au patrimoine arabo-andalous (Amel chante la Méditerranée) adapté par son frère, le violoniste et musicologue Rachid Brahim-Djelloul et interprété avec l’Ensemble Amedyez. Mais avec Les Chemins qui montent, Amel Brahim-Djelloul fait résonner encore un peu plus fort cette culture inscrite en elle depuis l’enfance.

A l’origine de ce retour aux sources, il y a le succès immédiat, sur YouTube au printemps 2020, de deux reprises chantées par la soprano en hommage à Idir, le grand artiste algérien d’expression kabyle qui venait de disparaître. Signe qu’il fallait gravir désormais ces chemins qui montent vers les sommets de la Kabylie.

Un programme personnel et intime Amel Brahim-Djelloul a donc construit au fur et à mesure ce périple intime autour de quatre personnalités artistiques importantes : « J’ai grandi avec Idir, artiste très présent dans le coeur de tous les Algériens. Il a apporté une modernité à notre culture et l’a fait connaître au monde entier, bien au-delà de la Grande Kabylie.

Djamal Allam et un autre chanteur marquant pour moi, issu de la Petite Kabylie, dont la voix très lyrique a également occupé une place importante dans le répertoire de la variété algérienne.

Je voulais aussi emmener ce projet un peu plus loin dans la tradition en allant chercher du côté de Taos Amrouche qui toute sa vie a tenté de restituer un fond ancestral. Je me retrouve moins dans la dimension complexe et torturée de sa personnalité, mais sa voix était très singulière, fortement influencée par l’art lyrique. Elle a figé les formes traditionnelles de la musique telle que les femmes la vivaient et la faisaient vivre dans les villages.

Il était également essentiel pour moi d’évoquer la figure de la mère. Le charme et la douceur du chant féminin du groupe Djurdjura était une très belle façon d’exprimer cet amour maternel, au travers d’une berceuse.

En parallèle de tout cela, il me fallait un guide dans cette langue kabyle qui n’est pas ma langue maternelle. J’ai trouvé ce guide en la personne de Rezki Rabia, poète en langue kabyle et française, qui m’a appris à m’approprier ces textes et à les restituer le plus fidèlement possible dans mon chant. Quatre de ses poésies ont également été mises en musique par Thomas Keck afin d’enrichir le panel des thèmes abordés et apportent cet ancrage dans la Kabylie d’aujourd’hui. »

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