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L’Iran annonce la fin de la police des mœurs

L’Iran annonce la fin de la police des mœurs

La « patrouille de la guidance islamique » était la force de police qui avait arrêté Mahsa Amini, la jeune Kurde iranienne de 22 ans dont la mort a déclenché un vaste mouvement de contestation dans le pays.

Le procureur général de l’Iran, Mohammad Jafar Montazeri, a annoncé samedi que la police des mœurs avait été supprimée par les autorités compétentes, selon l’agence de presse ISNA dimanche 4 décembre. « La police des mœurs n’a rien à voir avec le pouvoir judiciaire, et elle a été abolie par ceux qui l’ont créée », a-t-il affirmé samedi soir dans la ville sainte de Qom.

Cette annonce, considérée comme un geste envers les manifestants, est survenue après la décision des autorités, samedi, de réviser une loi de 1983 sur le port du voile obligatoire en Iran, imposé quatre ans après la révolution islamique de 1979.

Signifiant littéralement la « patrouille de la guidance islamique », il s’agit de la force de police qui avait arrêté Mahsa Amini, lui reprochant d’avoir enfreint le code vestimentaire strict de la République islamique. La mort de la jeune Kurde iranienne de 22 ans, le 16 septembre, trois jours après son arrestation, a déclenché un vaste mouvement de contestation dans le pays.

Selon des militants et sa famille, Mahsa Amini a succombé après avoir été battue, mais les autorités ont lié son décès à des problèmes de santé, démentis par ses parents. Lors de cette vague de manifestations, des femmes, fer de lance de la contestation, ont enlevé et brûlé leur foulard, en criant « Femme, vie, liberté ! ». Malgré la répression qui a fait des centaines de morts, le mouvement de contestation se poursuit.

Travail autour du port du voile obligatoire

La police des mœurs, connue sous le nom de Gasht-e Ershad, avait été créée sous le président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad, pour « répandre la culture de la décence et du hijab ». Elle était formée d’hommes en uniforme vert et de femmes portant le tchador noir, qui couvre la tête et le haut du corps. Cette unité avait commencé ses patrouilles en 2006.

Le rôle de la police des mœurs a évolué au fil des années, mais il a toujours divisé, même parmi les candidats à la présidentielle. Sous le mandat du président modéré Hassan Rohani, on pouvait croiser des femmes en jeans serrés portant des voiles colorés. Mais en juillet, son successeur, l’ultraconservateur Ebrahim Raïssi, a appelé à la mobilisation de « toutes les institutions pour renforcer la loi sur le voile », déclarant que « les ennemis de l’Iran et de l’islam voulaient saper les valeurs culturelles et religieuses de la société en répandant la corruption ».

Les femmes qui enfreignent le strict code vestimentaire de la République islamique d’Iran risquaient d’être embarquées par cette unité. Samedi, le même procureur a annoncé que « le Parlement et le pouvoir judiciaire travaillaient » sur la question du port du voile obligatoire, sans préciser ce qui pourrait être modifié dans la loi. Il s’agit d’une question ultrasensible en Iran, sur laquelle s’affrontent deux camps : celui des conservateurs, qui s’arc-boutent sur la loi de 1983, et celui des progressistes, qui veulent laisser aux femmes le droit de choisir de le porter ou non.

Selon la loi en vigueur depuis 1983, les femmes iraniennes et étrangères, quelle que soit leur religion, doivent porter un voile et un vêtement ample en public. Depuis la mort Mahsa Amini et les manifestations qui ont suivi, un nombre grandissant de femmes se découvrent la tête, notamment dans le nord de Téhéran. Le 24 septembre, soit une semaine après le début des manifestations, le principal parti réformateur d’Iran a exhorté l’Etat à annuler l’obligation du port du voile.

L’Iran, qui voit dans la plupart des manifestations des « émeutes », accuse notamment des forces étrangères d’être derrière ce mouvement pour déstabiliser le pays. Selon un dernier bilan fourni par le général iranien Amirali Hajizadeh, du corps des gardiens de la révolution, il y a eu plus de 300 morts lors des manifestations depuis le 16 septembre.

Le Monde 

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