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Accord franco-algérien du 27 décembre 1968: Agitations françaises autour d’un texte vidé de son sens

Depuis plusieurs semaines, la droite française multiplie les initiatives pour remettre en cause ou dénoncer l’accord de 1968 qui régit la mobilité et le séjour des Algériens en France.

Entre ambitions électorales, enjeux diplomatiques et tensions historiques, Paris évoque désormais une possible révision, tandis qu’Alger reste prudente, dénonçant une instrumentalisation politique et rappelant la souveraineté de son partenariat avec la France.

La controverse s’inscrit dans un contexte de relations bilatérales fragilisées, où chaque camp défend ses intérêts face à une question sensible et profondément symbolique.

Une fois encore, la droite française revient à la charge et veut réviser autant l’accord migratoire signé entre Paris et Alger, c’est-à-dire l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968, alors destiné à organiser la mobilité, le séjour et le travail des Algériens en France, qui est aujourd’hui présenté comme un vestige juridique vidé de son contenu, que sa dénonciation pure et simple.

Depuis l’épisode politique dramatique de Retailleau et les ruades de l’extrême droite vis-à-vis d’un accord plusieurs fois revu et qui ne sert nullement les intérêts de l’Algérie et sa communauté en France, notamment les étudiants algériens, il y a eu une certaine accalmie dans les attaques frontales de la droite française contre l’Algérie avec en ligne de mire l’exécution des OQTF mal ficelées et qu’Alger dénonce, car ne suivant pas la ligne établie justement par ces accords de 1968 et révisés notamment en 1994.

Le ministre français de l’Intérieur, Laurent Nunez, dont l’arrivée à Place Beauvau avait calmé la tension entre les deux capitales, a donné un entretien au journal français dominical le JDD dans lequel il revient justement sur cet accord de 1968 et la reprise des contacts avec l’Algérie, particulièrement les discussions autour des reconduites aux frontières, faisant état pour la première fois de discussions entre Paris et Alger, avant d’avancer une échéance pour l’aboutissement des discussions.

Il a dans la foulée annoncé que ses services ont lancé le chantier de la révision de l’accord franco-algérien de 1968 qui régit l’immigration algérienne en France.

Mais, aux démarches forcenées des autorités françaises d’imposer leur vision des reconduites aux frontières concernant les ressortissants algériens, et qu’Alger dénonce car enfreignant les protocoles, le premier policier français a répondu : ‘’Pas encore. Nous poursuivons les discussions sur des sujets techniques, de procédure, avec l’ambition que le rétablissement des flux se fasse sur un bon rythme et soit pérenne dans le temps.” 

Entre-temps, il doit se rendre à Alger pour une visite officielle afin de discuter de ces questions avec les autorités algériennes. Selon lui, ‘’il ne s’agit pas de régler quelques cas d’un coup, mais de revenir à une situation normalisée”, ajoutant que ses services travaillent parallèlement à la révision des accords de 1968, et que l’idée est d’obtenir des “positions communes sur tous ces sujets”.

La révision de l’accord de 1968, un accord qui enrage la droite et l’extrême droite, qui voulaient l’abroger, et ils y sont parvenues après le vote du 30 octobre dernier du Parlement français, le Premier ministre français Sébastien Lecornu a de son côté confirmé le revirement officiel de Paris vis-à-vis d’un accord international et non pas bilatéral.

Ce que les politiques et les officiels français veulent cacher à l’opinion publique française. Cependant, le successeur de Retailleau est tout autant désireux de revenir sur cet accord, qui module toute la mobilité des Algériens en France. Il dira à ce propos que ‘’nous pouvons nous montrer fermes dans le dialogue.

Et je vous confirme que nous discutons de manière exigeante avec les autorités algériennes.’’ ‘’Mais, ajoute-t-il, l’exigence n’empêche pas le respect mutuel”, se disant confiant ‘’pour que les discussions aboutissent rapidement. Il faut que ce soit bouclé dans les prochaines semaines. Je suis confiant.”

La réponse du berger à la bergère

 A Alger, on reste cependant calme, et les autorités algériennes ne sont guère ébranlées par le brouhaha parlementaire en France et le tohu-bohu politique provoqué par la droite et l’extrême droite pour abroger l’accord de 1968, c’est-à-dire renier les engagements internationaux de la France vis-à-vis d’un partenaire stratégique.

C’est le chef de la diplomatie algérienne Ahmed Attaf qui a donné la position officielle de l’Algérie vis-à-vis du vote du Parlement français relatif à la révision par Paris de cet accord. A la chaîne Al24 news, il a expliqué que cette affaire ne concerne pas «pour le moment» les autorités algériennes.

Il s’agit, a-t-il dit, d’une affaire «franco-française entre l’Assemblée nationale et le gouvernement français», avant de préciser que «c’est une affaire intérieure qui ne nous concerne pas pour le moment».

Mais ‘’cette affaire pour­rait nous concerner si cela devenait une affaire de gouvernement à gouvernement parce que l’accord de 1968 est un accord inter­gouvernemental, un accord international’’Et ‘’le gou­vernement français n’a rien dit à l’Algérie sur ce sujet’’, ajoute-t-il.

Il poursuit : ‘’Sur le fond, nous ne réagissons pas (…) Au plan gouvernemental, nous n’avons rien vu venir, et nous espérons ne rien voir venir». Quant au vote de l’Assemblée française d’une résolution visant à dénoncer l’accord de 1968, il estime qu’il est ‘’attristant de voir un pays aussi grand que la France faire de l’Histoire d’un autre pays, indépendant, souverain, l’objet d’une compéti­tion électorale anticipée en France», a-t-il déclaré.

‘’Très sin­cèrement, j’ai beaucoup de respect pour l’Assemblée nationale française, mais lorsque j’ai vu ce vote (…), la première pensée qui m’est venue à l’esprit est que la course à l’échalote se pour­suit’’, a souligné M. Attaf. En fait, l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968, initialement destiné à organiser la mobilité, le séjour et le travail des Algériens en France, est aujourd’hui présenté par la droite française comme un vestige juridique vidé de son contenu.

La France, revenant sur ses garanties concernant cet accord, l’a progressivement restreint, notamment en 1974, par la suspension de l’immigration de travail, en 1986 par l’instauration du visa obligatoire et en 1993 par le durcissement des conditions de séjour.

Et l’accord est aujourd’hui politiquement instrumentalisé en France pour dépeindre les Algériens comme des « bénéficiaires d’un régime de faveur », notamment par les courants d’extrême droite, les revanchards de l’Algérie française.

Sur les plans diplomatique et politique, cet accord de décembre 1968, en tant que traité international, prime sur le droit français. Des avenants ont été introduits en 1985, 1994 et 2001, et ont restreint certains avantages aux Algériens.

En France, cet accord est devenu, hélas ! un enjeu politique majeur avec des appels (notamment du Rassemblement national) à le dénoncer pour le « réaligner » sur le droit commun, malgré les complexités juridiques et les implications diplomatiques.

Et contrairement à ce que veulent faire croire les politiques et le gouvernement français, l’accord n’a pas toujours suivi les avancées du droit commun (ex : passeport talent), créant des désavantages pour certains Algériens. 

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